Sérendipité de mer 3


Sous mes joues glacées, la mer était vert-de-gris. Les cheveux roux étaient fous dans le vent vif. La vie avait deux côtés. Pile, on voyait les falaises mi grises mi raisins. Face, on contemplait les coques de fer mi figue mi pimpantes. Les cheminées ne crachaient pas de feu. Le vent mangeaient nos visages rougis. Sous nos pieds, le sable beige avait durci d’eau éloignée. Il s’égrainait en souffle transparent au ras du sol.

Face à elle, j’ai appris à rêver sans rien faire. Assise sur des rochers saillants, elle me soupirait des songes bleus et salés. Des heures durant, j’aimais y chercher des cailloux roulés par les flots.  Des blancs, des verts bouteilles et des messages codés dans les morceaux de vie policés par les déboires. Tous ces cailloux finissaient dans de grandes bonbonnes de verre d’où l’huile d’olive avait disparue. Un jour, au bord du chemin, je les ai toutes laissées. Sur le sable beige et gris, une plume blanche attendait que je la soulève. Douce et sale au bout. Allégorie. Je l’ai lâché au vent. C’était sa destinée.

Tout au bout du monde se niche un décor de film. J’y ai garé la voiture en dehors du cercle blanc. Dans les films de Noël, la pluie s’arrête face aux amoureux. Au présent, le ciel éprouvait nos corps.  Entre les bras de port, le grand bateau a-t-il des jambes pour aller au bout du monde ? Vert-de-gris, répondit l’écho. J’aurais voulu rester filer la laine auprès de la mer rapeuse. Est-ce que l’amour est fabriqué en Chine avant d’être enfermé dans un container argenté ? La légende raconte qu’un jour de gris et de vert, un marin fou de jalousie a jeté le grand cube de métal au milieu des flots furieux. Et depuis, les êtres humains traversent les écluses à la recherche de l’herbe verte et fraiche.

 


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3 commentaires sur “Sérendipité de mer

    • MarieTopic Auteur de l’article

      Capacité, aptitude à faire par hasard une découverte inattendue et à en saisir l’utilité (scientifique, pratique)

      Merci :)

  • Gil Reve

    Il faut avoir le pied marin pour lire ton très beau texte coloré.
    L’évasion mentale que peut procurer l’immensité de l’Océan,
    est palpable, et c’est vrai, que l’on peut se poser la question,
    de comment, on peut détruire toute cette nature.
    Bonnes fêtes à toi Marie.