J’ai perdu mon sexe
sur le trottoir
tous les jours je descends
tous les jours je crois
le retrouver
tous les jours, je vous le jure
Je descends
tous les jours perdus
J’ai vu mon sexe par la fenêtre
J’habite au premier étage
Il est vert
Il est posé à côté du trottoir
Sur les places de parking
Il a dû tomber d’un caddie
du supermarché du bout de ma rue
toutes les heures
Je regarde mon sexe
Il ne bouge pas
Sa couleur verte ne bouge pas
Il ne s’abime pas
Personne ne vient mettre
la main sur mon sexe
Il est vert, bien frais
Aucune voiture ne s’est garée dessus
Personne ne l’a ramassé
je ne descends pas
mon sexe pourrait s’échapper
plus je le regarde
plus il ressemble
aux feuilles de salade
plissées, bien lissées
Je commence à l’aimer
Je rêve
mon sexe est femme
J’y pose la main
Elle me sourit
Je sens sa culotte trempée
Baiser ses lèvres
Entrer le doigt par sa fenêtre
Tourner à la prochaine rue
Elle écrirait mon prénom
Presque à la fin de son zine
Au milieu d’une orgie
féminine
Son sexe est femme
Elle frotte mon trottoir
Elle dépose ses seins
dans mon caddie
sur le parking
sous ma fenêtre
ses aisselles sentent le bout de ma rue
Je suce son vert
Je câline ses escaliers
Sa voiture est douce
Nos langues se supermachent
Il est rentré à la maison
Je dis
Viens voir
Viens par la fenêtre
Regarde mon sexe
comme il est beau
bien vert
bien plissé
dommage
quelqu’un l’a perdu dans la rue
il a dû tomber d’un caddie
sur le carreau
à côté du trottoir
sur le parking
sous la lucarne
Je lui dis
Personne ne s’est garé dessus
Il est toujours vert
Les minutes ne l’ont pas flétri
Il me regarde d’un air affligé
Je me dis
Il ne doit pas aimer
Les fenêtres au premier étage
Il ne doit pas aimer
Les maisons à lucarnes
Je suis si sensible
aux voitures mal garées
Mon sexe en tremble
depuis la rue
Il me regarde d’un air affligé
Il dit
Ce n’est pas de la salade
Ton sexe
Je l’ai vu en marchant dans la rue
quand je rentrais
avant d’ouvrir la porte d’en bas
Ce n’est pas de la salade
qui est tombée du caddie
[ ]
C’est un brocoli
***
illustration : Alina Perez
Je mangerais bien du brocoli, moi, même si ce n’est pas ma tasse de thé (je parle du vrai).
Et dans ton cas, je ne l’essore pas. J’aime bien nature.
STP, Marie, peux-tu répondre aux coms.
Ça motiverait tes fidèles lecteurs.
Quelle que soit la manière de l’envisager, j’apprécie la dégustation de brocoli. Même s’il sent le bout de la rue et s’il a traîné sur le trottoir. Quoique dans ce dernier cas, j’apprécie qu’il passe par la salle de bain où l’on pourrait s’occuper de lui de la plus délicate manière, ou pourquoi pas brutalement, selon vos envies de dégustation.
Ajoutons à cela la possibilité de le dessiner avec un beau crayon vert polychromos. Chiche ?
Bien à vous
Gier.