Love & Sex festival 4


Elle vous accueille par une porte étroite dont la grille est ouverte. Elle a surgit depuis le bas de la ville qui franchit le fleuve. Elle est une citadelle qui vous prend au cœur d’un coup de langue rouge. Ses lèvres s’ouvrent pour présenter trois salles rangées en tranche napolitaine*. Vous y croisez la fée des lieux en robe violette. Adossé à un mur, un clitoris vous fait de l’œil tout en souhaitant que vous vous abandonniez entre ses bras doux. De confortables fauteuils de velours n’attendent que vos fesses. Au bar, des vapeurs cochonnes et des petites vertus coulent dans des verres ronds.  Vos yeux s’égarent sur des courbes bleues, de seins cicatrisés, du sang menstruel fleuri, des mollets à poils ou des sexes sucre d’orge. Félicitations ! Vous êtes l’un des heureux et nombreux visiteurs du Love & Sex festival.

Nora artiste complète

J’y étais. Et c’était un jour de chance. J’y ai croisé des bénévoles en rouge élégant aux petits soins des intervenants et des artistes. J’y ai rencontré des polyamoureux quia accueillaient à leur stand les quelques personnes qui osaient venir poser des questions ou confier des bouts de vie. Beaucoup repartaient avec de la documentation proposée sur la table. Des marchands de bonheur proposaient des sex-toys de qualité et parlaient sans fard de plaisir. Toutes les heures se succédaient une programmation à faire rougir les tartuffes du sexe à la papa. Des professionnels venaient interroger leurs pratiques liées à la sexualité tout en partageant leur expérience de terrain. Comment aborder la sexualité dans les institutions ou auprès de nos enfants ? Je regrette énormément de n’avoir pu assister au débat sur le porno féministe mais je buvais une vapeur cochonne en compagnie de deux comédiennes venues exprès pour lire mes textes. Ah mais oui ! Je ne vous ai pas encore dit pourquoi je trainais dans les couloirs du Festival.

Conseil aux jeunes femmes

Il était une fois, une femme qui surfait d’un blog d’illustrations à un autre. Ses voyages l’amenèrent sur les rives de blogs causant de la sexualité et en particulier sur celui de Nora Gaspard. Quand je serai grande, se dit l’exploratrice, j’écrirais comme Nora ! De fils en aiguilles et de mots en mots, elle rencontra la louve aux seins pâles , et le coquelicot s’ouvrit. Puis, un jour de joie, Nora lui demanda si elle souhaitait participer à un festival où la beauté de la sexualité serait mis en valeur. Après une longue procrastination, elle dit oui. Et c’est ainsi, qu’un vendredi de mars, lors de la journée internationale des droits de la femme, ses textes prirent vie devant un public attentif.

Badge de Rita Renoir

Autour d’un café, je discute avec Rita Renoir et Étincelles, mais j’ai la tête ailleurs. Je consulte frénétiquement mon portable, guettant des sms. J’attends avec impatience, les deux comédiennes qui vont donner vie à mes mots. Elles arrivent enfin ! Je les conduis dans les coulisses-cuisine. Il y fait hors du temps. Une artiste s’y maquille et s’y coiffe. Les comédiennes sortent leurs robes, mettent du rouge sur leurs âmes et demandent de l’eau. Je ferme une robe et cours chercher un verre d’eau. Je veux qu’elles soient bien. C’est assez étrange. Lors de mes dernières expériences de théâtre, c’était moi qui ressentait le tract avant l’entrée en scène. Là rien, pas un émoi, juste de l’attention au bien-être des diseuses de mots. Les bénévoles, aux petits soins, installent des chaises et des pupitres pour elles. Soudain, le tract me prend. Et si personne ne venaient les écouter ? Pour ne pas leur infliger la détresse de lire devant une salle vide,  me voilà dans les couloirs à racoler le visiteur nonchalant. C’est l’heure. Je bafouille quelques mots de présentation de  « A la mer comme à la guerre  » , une sélection de textes féministes, humoristiques, tendres et durs, poétiques et crus.

Elles lisent. Je ne sais décrire l’état dans lequel je suis tant il est nouveau. Je suis captivée par les mots ** qui sortent de leur bouche comme si je les découvrais. A d’autres moments, je bute sur certaines phrases maladroites ou pas assez fines. Parfois, j’admire la diction et les trouvailles des comédiennes pour donner corps au texte. Ici ou là, je sens que le texte échappe aux lectrices.  Régulièrement, j’entends la salle rire. Mon cœur bat une chamade sans sens comme si je faisais l’amour pour la toute toute première fois. D’ordinaire, quand je suis sur scène, je prends la température de la salle pour y adapter ma propre énergie. Mais là, mes perceptions sont brouillées car je ne peux pas agir, je ne suis pas actrice au premier sens du mot. Les personnes arrivées en cours de lecture restent. Je l’interprète comme un signe positif mais dans le même temps, je trouve que c’est trop long. Bref, je ne sais plus où j’en suis. C’est la fin, le public s’ébroue pour continuer à vivre le festival. Et c’est au bar autour d’une bière, que toutes les trois nous refaisons la scène, se promettant de réitérer l’expérience ailleurs, en affinant nos productions. Et c’est  bon.

Il reste tant de choses à dire. La présentation du projet Pierre Louÿs avec Rita et Nora, les dessins de Rita, les échanges avec Étincelle, le cabaret de velours où Nora et sa troupe ont fait susurrer les mots du sexe, les textes érotiques en lecture libre à la libraire du festival, le tampon rouge & que je voulais absolument avoir sur le poignet, la sélection des livres sur la sexualité, l’atelier de Nora sur les mots beaux mots du sexe, les échanges avec une avocate sur le polyamour et le droit, le débat que j’ai animé sur le polyamour, le 8 mars, le food-truck et ses excellent bagels au bœuf, la ville de Namur et l’AVC de Beaudelaire sur les marches de l’église Saint-Loup dont les confessionnaux en bois sont magnifiques, le marché de Namur, le petit-déjeuner au pain quotidien ou le shoot de whisky avant de dormir en compagnie des comédiennes. Mais il faut rentrer maintenant. Merci Nora !

 

* Et si vous ne savez pas ce qu’est la tranche napolitaine, il fallait se glisser au Le Cabaret des Mots Velours

** Une partie des textes lus ce jour-là : Hélène de Troie (Texte retravaillé pour le festival et donc un peu différent de celui-ci) ; Conseil aux jeunes filles dont la fleur est éclose (à trouver dans le projet Pierre Louÿs) ; Sérendipité de mer ; Apprivoise-moi. 

***

Illustration : Rita Renoir

Sottize est dans la galerie de photos de ce billet

Ici l’article de Étincelles sur le festival (et elle écrit bien et a fait de jolies photos !)


Si tu as envie d'écrire, j'aurais plaisir à te lire

4 commentaires sur “Love & Sex festival

  • emmaPétro

    L’église Saint Loup ? Alors peut-être as-tu croisé deux amants qui se rendaient à la Brasserie François pour prendre un café…
    Félicitations pour tes textes, cela doit être grisant d’entendre ses propres mots !

  • Gemssa

    Merci de ce beau partage, Marie.
    Sûrement une excitante aventure, ce festival.
    Merci aussi de nous faire découvrir Nora, Rita et Etincelles.
    Je ne manquerais pas de revenir sur leurs mots que je viens de survoler et qui me séduisent déjà.
    Un seul regret, pas d’enregistrement des lectures de tes textes de ces stars (pas de noms, non plus) ?
    J’espère aussi qu’un texte sur la poursuite de la nuit avec elles, suivra.
    Et oui, gemssa est gourmand.

    PS: Nora a-t-elle un blog ? (je n’ai pas Instagram)
    Ces illustrations sont magnifiques.

    • MarieTopic Auteur de l’article

      Bien sûr que Nora Gaspard a un blog. Et le lien de son blog est dans la rubrique « j’aime lire » du mmien.
      Vos autres demandes formulées sans vraiment l’être ne seront pas exaucées.