L’homme qui habilla Lucky Luke en rose 4


Lucky Luke en rose ? koi que sé ? Vous trouverez dans ce drôle de billet des observations sur les couleurs de la BD « L’homme qui tua Lucky Luke » de Matthieu Bonhomme. Et vous n’y trouverez rien d’autres car ce n’est pas vraiment mon talent de faire dans la déconstruction méthodique ni de faire dans la méthode tout court (d’ailleurs pour faire je vais plutôt aux toilettes. Non je n’ai pas honte. Au fait, vous dites WC, water, ou toilettes, vous ?). Donc, je ne suis pas spécialiste de BD,  de western ni de scénarios. J’ai juste lu, relu et rererelu les quelques Lucky Luke qui trainaient dans la maison de vacances où il n’y avait rien d’autre à faire à part ramasser des pommes de pin dans la forêt (enfin si on pouvait également y lire des vieux tintins, des stroumfs, des club des cinq, des Buck Danny, des Langelot et des livres pour les grandes personnes). Parfois, nous avions droit à quelques dessins animés de croque vacances dont le plaisir principal se situait dans le générique.

Cette étrange manie de vous raconter ma vie avant de commencer un article a pour but de :

– vous raconter ma vie sous couvert de prise en compte de la subjectivité inhérente à toute œuvre, enfin article, enfin billet de blog à 100 lecteurs/jours les semaines d’abondance

– situer mes propos dans une époque dont vous trouverez les traces dans le paragraphe d’introduction et rappeler que je connais rien au sujet que je vais maintenant, et enfin, traiter.

Mathieu Bonhomme a donc réalisé une BD en hommage à Morris où beaucoup de scènes sont cinématographiques et semblent être filmées avec une caméra. On trouve aussi, des clins d’œil aux Westerns. Il y a peu j’ai ressorti cette BD et l’ait feuilleté dans le désordre pour la vanter à mon interlocuteur. Soudain un Lucky Lucke tout de rose coloré m’interroge sur l’utilisation des couleurs par Bonhomme qui va s’avérer être un dédicace au travail de son « ami d’enfance ». J’ai alors ressorti, le premier album de Morris qui me tombait sous la main: Ma Dalton. Et voici, mes petites observations.

Ci-dessous, le fameux Lucky Luke rose. En tombant sur cette case, mes réflexions furent dans le désordre de mon cerveau : tiens les couleurs ressemblent à celle de Morris; est-ce que Morris utilise le rose? Est-ce le seul endroit de la BD où il y a du rose ? Dans cette scène, il y a une unité de couleur (jaune, rose, et une pointe de bleu) et est-ce que cette unité de couleur se retrouve ailleurs dans l’album ?

L’homme qui tua Lucky Luke

Recherches faites (ce fut long et fastidieux. J’ai dû poser mon mug de café pour avoir les deux mains libres et même m’assoir correctement sur ma chaise), le rose apparait dans la BD en même temps que le personnage féminin. Plus exactement, il le précède. Dans la planche ci-dessous, la diligence qui arrive au loin, est rose/violet. Tout au long de l’album, les cases en rose disent le féminin, même si ce n’est que la trace de ce féminin

L’homme qui tua Lucky Luke

Dans « Ma Dalton », aucune trace de rose, mais il en existe dans d’autres albums. Par contre, des personnages colorés d’une seule teinte sont y présents. Ci dessous : les dalton sont en noir, puis en marron clair/ocre. On retrouve ce bleu et ce marron clair dans toute l’album de Bonhomme. D’autre part, j’ai noté dans les albums qu’il y avait pas mal d’aplats de couleur et que  le  rouge est souvent associée à une émotion de colère :

Dans ces deux extraits de planches, on peut aussi remarquer que la lecture peut se faire de gauche à droite de manière classique, mais aussi de haut en bas par colonne. Il y a une sorte de logique de couleur et de sens dans les colonnes.

Autre exemple de lecture visuelle en colonne chez Morris :

Ma Dalton

Ceci me permet en outre de monter trois manières de représenter Lucky Luke chez Morris que l’on retrouve aussi chez Bonhomme. J’ai cherché si Bonhomme utilisait aussi le noir complet que l’on observe dans la dernière case présentée ci-dessus.  Voici un traitement de l’effet diapositive avec noir et blanc inversé par Bonhomme. Je trouve cette case magnifique :

L’homme qui tua Lucky Luke

Ce qui m’a particulièrement frappé dans le travail de Bonhomme, c’est la cohérence ou le camaïeu des couleurs par planche comme celle avec la diligence ou dans celle-ci :

L’homme qui tua Lucky Luke

Ocre chaud pour l’intérieur, bleu froid pour l’extérieur de nuit. Quand Lucky Luke sort, la porte entrouverte permet la transition entre cet ocre et ce bleu.

Pour terminer sur la couleur, voici deux extraits de planches qui parlent d’eux-mêmes :

J’ai la sensation de terminer une explication de texte niveau collège. Et comme depuis toujours, je n’ai pas de conclusion. Ici est ma revanche: pas de note, pas de corrections et peut-être pas de lecteurs.

Conclusion : (oui j’en ai trouvé une entre-temps)

Le rose pour signifier le féminin, on en parle ?

***

Pour compléter voici une citation de Bonhomme extrait de cet article lu après la rédaction de ces réflexions hautement critiques :

« Je me suis amusé sur la codification de couleurs liée au premier rôle féminin, explique Matthieu Bonhomme. Dès qu’elle entre en scène, le rose envahit la case. À sa première arrivée, la diligence est mauve ; elle est toujours habillée de rose ou de violet ; le bureau du shériff devient rose à son entrée, etc. Je désirais que ce personnage irradie. Je joue donc sur le graphisme et les codes mis en place par Morris pour souligner sa présence. »

Et pour la caution sérieuse et bien comme il faut, l’article de Télérama


Si tu as envie d'écrire, j'aurais plaisir à te lire

4 commentaires sur “L’homme qui habilla Lucky Luke en rose

  • gemssa

    Très bel exposé.
    Ca, c’est décortiqué,
    et le résultat est très intéressant.
    Il fallait y penser.
    Merci.

    Quand on introduction,
    à savoir raconter ta vie,
    si tu as raison,
    car ça te situe,
    et nous on se situe aussi
    par rapport à toi.
    Les ouvrages que tu cites
    je les connais aussi (club des cinq,Langelot, etc…)
    Le plus avec une pointe d’humour…
    J’utilise un autre nom pour les WC.

  • Raphaël

    Je dis toilettes ou wc ou chiottes, c’est selon le public sans doute. ça y est tout ceux qui passeront ici sauront tout sur moi !
    Bon, j’ai pas compris ce qui t’avait poussé à une telles analyse, mais visiblement l’interview confirme ton intuition.
    Te voilà prête a apprécier cet art. Dans l’esprit chromatique dépouillé je te conseille… et merde j’arrive ^plus à trouver le titre de la bd, pas plus que l’auteur, zut !!!