Elle est belle. De l’autre bout de la rue, j’ai vu son rouge, celui de ses lèvres, celui de son foulard. Je m’assois à leur table. Elle est loin de moi. Belle du jour qu’elle a traversé, le rouge un peu effacé, de la lèvre au doigt, une cigarette. Fascinant. Elle est suffisamment éloigné de moi pour que je puisse la regarder tranquillement et l’écouter. Ses yeux s’illuminent dès qu’ils parlent à son amoureux.
Elle est belle, altière et blonde. Son cou dégagé me murmure de jolies images. Ses yeux sont colorés et sa bouche est intelligente. Libre et bonne élève à la fois, elle danse quand elle marche. Je me fais un film qui n’appartient qu’à moi. Je ne veux pas la posséder. C’est un oiseau, et les oiseaux chantent mieux en liberté. Elle est fragile aux encoignures. Elle est à cheval sur sa moto. Elle se fait une queue de cheval. Quand elle mordille son stylo, mon papier crisse de joie.
Elle belle, brune et son t-shirt jaune fait fleurir son ventre. Pantalon cargo kaki, basket blanche, veste en jeans, elle est banale si tu ne sais pas la regarder. Son esprit fuse aussi vite que la musique. Sa science infuse les réunions. Rebelle et bonne élève, elle vous emmène dans son sillage. Elle aime faire du vélo dans les embruns salés aux portes bleues. Je plonge mes yeux parmi ses seins. J’imagine le goût de sa chatte. Je rêve d’en connaître l’empreinte.
Elle a les yeux verts intenses puissant irrésistibles captivant. Ses cheveux ont des mèches rousses et ses cils sont allongés de noir. Fine comme une allumette, elle déplace des plaques de contre-plaquée. Ses bottines de cuir noires me font frisonner l’échine. Intelligente comme une pluie chaude de printemps qui vous irrigue le cœur aride. Je voudrais attacher, si elle le veut, ses cheveux à l’escalier pour la regarder fondre de plaisir.
Je lève les yeux, elle avait les siens fixés sur moi. Nos regards se croisent quelques secondes. Elle nettoie une caisse enregistreuse, noire et luisante. Elle ne détourne pas son regard, et ce n’est que l’appel d’une cliente qui l’a fait retourner parmi les robes de coton. Les cheveux très courts, presque rasé, tout habillé de jeans, des sandales compensées. Elle m’attire plus surement que la caresse de la lumière.
Elle est féline. Rien de plus. Jupe simple, tongs dans la rue, tu ne peux pas savoir qu’elle domine son monde et qu’elle se soumet à l’intense. Moi, je le sais. Je connais son cul nu, rouge et flamboyant. Je connais la fumée douce qui sort de sa bouche, et les plantes qu’elle fait pousser sur son balcon. Je n’ai jamais entendu ses doigts sur le clavier noir et blanc. Je sais la douceur de sa langue mon orteil. Je connais la taille de ses seins entre mes lèvres.
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Illustration : Gracy Gimp